Allocution du Professeur
Jean-Jacques Eledjam, président de la Croix-Rouge française
Extraits du discours prononcé par le professeur Jean-Jacques
Eledjam lors du lancement du Grand Rassemblement de Reims, samedi 12 octobre
2013.
Monsieur le
Ministre, Chers Amis,
Cher Benoit
Hamon, je voudrais tout d'abord vous remercier d'avoir sacrifié votre samedi
matin pour venir à la rencontre des forces vives de la Croix-Rouge française,
et ainsi témoigner la reconnaissance de l'Etat à celles et ceux qui font battre
le cœur de notre Association. "..."
Monsieur le
Ministre, si c'est un privilège pour moi de vous accueillir dans cette
enceinte, j'imagine que c'est aussi pour vous une occasion exceptionnelle de
rencontrer sans intermédiaire une grande partie des élus, des responsables
d'activité et des salariés de notre Association.
Des gens de
bien, des gens compétents, avec leur caractère, mais qui sont mus par une seule
ambition, tendre la main aux plus précaires. Je suis d'autant plus ému de
prendre la parole devant cette assistance aujourd'hui que c'est ma première
prise de parole depuis mon élection comme Président de la Croix-Rouge
française.
Président
Régional de la région Languedoc-Roussilon puis administrateur de la CRF me
voilà aujourd'hui Président national. Je suis honoré de la confiance qui m'est
faite. Je mettrai toute mon énergie pour ne pas vous décevoir et pour fixer,
avec le conseil d'administration, un cap ambitieux et cohérent. Mais soyez-en
persuadé, venant du réseau associatif, je ne vous délaisserai pas pour gagner
une quelconque reconnaissance, je serai au milieu de vous, un bénévole certes
pas tout à fait comme les autres, mais assurément un des vôtres.
Mes chers
Amis c'est en toute humilité que je suis là aujourd'hui devant vous pour un
rendez-vous important, probablement le plus important de mon aventure au
service de la collectivité, afin de partager les difficultés auxquelles nous
allons devoir faire face avec lucidité et courage "..." j'ai découvert malgré mon appartenance au terrain, le poids
de notre Association, mais aussi ses faiblesses. Malgré un
optimisme naturel je doute que sans une réaction rapide de notre part, nous ne
soyons plus qu'une grande association fragilisée et en perte de moyens.
Dans un
contexte économique et social où la précarité ne fait que s'amplifier, où
toutes les formes de douleur se multiplient, il nous appartient de structurer
nos actions, en innovant, en modernisant, et en maîtrisant les coûts au centime
d'euro près "..." et exclure définitivement
toutes pertes.
"..." Vous, élus et responsables d'activités, volontaires donnez sans compter
pour développer nos actions, qu'il s'agisse de formation aux gestes qui
sauvent, de secourisme, d'action sociale. "..." Je crois et j'affirme la complémentarité entre les bénévoles et les
salariés. Rien ne doit les opposer, "..." Laissez-moi
prendre pour exemple la trop grande absence de nos bénévoles dans nos
établissements, alors qu'ils pourraient être nombreux à vouloir s'y investir,
notamment pour animer la vie quotidienne souvent bien terne des personnes âgées
ou dépendantes que nous prenons en charge. Oui
aujourd'hui je le demande solennellement, je souhaite que nos bénévoles
investissent de leur chaleur nos établissements et y apportent un élan de
bien-être supplémentaire. "..."
Oui le
bénévolat n'est pas mort, oui nous devons ouvrir nos cœurs et les portes de nos
délégations, oui nous devons innover dans nos modes de recrutement, car nous ne
serons jamais assez nombreux pour faire face aux difficultés sociales
actuelles.
"..." Vous
êtes-vous déjà posé la question de savoir combien de personnes souffraient tout
près de vous sans que vous ne le remarquiez ???
Nous
prétendons humaniser la vie de tous, bien au-delà de nos frontières et à
travers le monde, mais commençons par traquer les souffrances de ceux qui nous
entourent et apportons y des réponses sans aucune fausse pudeur.
Les besoins
augmentent, nos effectifs pour y répondre doivent aussi augmenter pour y faire
face avec pugnacité.
Pour ceux
qui ne l'auraient pas compris, je demande expressément que l'on s'exonère des
murs construits au sein de notre institution pour conserver un pré-carré de
petits pouvoirs personnels, alors que j'en ai la conviction, l'isolement dans
une structure comme la nôtre n'est que le signal d'un recul, d'une pauvreté
intellectuelle et morale qui empêche d'avoir cette puissance collective, gage
de réussite dans la lutte que nous menons contre la précarité, la dépendance et
l'exclusion.
"..."
Le respect
et la chaleur humaine vis-à-vis des autres à l'extérieur de nos murs, doivent
également s'imposer naturellement entre nous, et je vous le demande, avant de
prétendre humaniser la vie des autres, commençons par humaniser nos échanges...
"..."
La
Croix-Rouge française a des spécificités et elle doit renouer désormais avec
ses fondamentaux ; elle doit continuer à faire ce qu'elle sait faire et ce
qu'elle fait bien et laisser aux autres associations. « Je
sais ce que je fais, je fais ce que je sais ». La
surenchère entre associations est aujourd'hui dépassée et consommatrice de bien
trop d'énergie. Il est temps désormais de travailler en réseau avec nos
partenaires associatifs, chacun dans son domaine d'activité.
Pas
seulement avec nos partenaires associatifs, mais aussi avec tous nos
partenaires institutionnels quand les synergies sont possibles. Nous ne sommes
pas une association comme les autres, nous sommes la Croix-Rouge en France,
auxiliaire des pouvoirs publics. "..."
S'il nous
appartient d'innover de manière raisonnée, nous devons également nous recentrer
sur nos grands métiers traditionnels : le secours, la formation aux métiers du
social et du sanitaire, l'aide à la personne, la santé et le soutien à
l'autonomie.
"..."
Enfin
j'attends de nos établissements le meilleur service et une gestion sans faille. "..." Pour
les établissements déficitaires, il sera du devoir de leurs responsables de
s'engager sincèrement dans des plans de retour à l'équilibre. Il ne s'agit pas pour l'Association de gagner de
l'argent, mais de ne plus en perdre.
"..."
Enfin, et
c'est notre devoir, sur l'ensemble du territoire, le secourisme et son
triptyque formation /prévention /action, sera replacé au cœur des services
proposés par l'Association, pour former avec le social, l'ossature de notre
organisation.
"..." Former aux gestes qui sauvent c'est sauver des vies, tenir des postes
de secours, disposer d'équipes de secouristes dynamiques
et disponibles, c'est sauver des vies en anticipant la réponse aux urgences et
aux catastrophes. Voilà aussi ce que les français attendent légitimement de
nous, voilà ce que nous allons nous attacher à leur offrir.
"..."
En 2014,
nous serons à nouveau tous réunis pour nos 150 ans, et nous pourrons être fiers
de porter haut les couleurs de notre Association.
La
Croix-Rouge est née sur un champ de bataille et au milieu des ruines car il
fallait répondre à la souffrance de soldats blessés laissés pour
morts....Aujourd'hui, nous évoluons toujours dans une société en guerre, en
guerre contre la pauvreté, la précarité, l'exclusion... mais les ennemis sont
plus fourbes. L'homme a inventé la misère, il lui appartient d'en
débarrasser le monde.
Restons unis
chers Amis car notre tâche est lourde, restons unis cher Amis car nous devons
réagir et soigner toutes les souffrances ; restons unis chers Amis car comme le
soulignait Albert Einstein : « Le monde est dangereux à vivre non à cause de
ceux qui font le mal mais à cause de ceux qui regardent et laissent faire. ».
Nous ne pouvons être de ceux-là.
Jean-Jacques Eledjam
Président de la Croix-Rouge française